
Origine de la
Fête de la Trôle

La Trôle apparaît à Paris dans la même période que la création de la Cour de l’Industrie soit vers 1850.
Venant du latin populaire tragulare, trôler était un terme de vénerie pour chercher la trace du cerf au hasard en parcourant la nature.
Transposé dans les faubourgs, il indique bien l’opposition au sédentaire, à la boutique, c’est dehors,
dans la rue, qu’on cherche le chaland. Ainsi, par extension, une trôleuse était une prostituée.
De même, l’ébéniste tombé dans la débine promenait ses meubles sur une charrette, de-ci, de-là.
Le droit de Trôle (droit dans le sens d'une coutume faisant force de loi) était en deux volets. Le droit de déballer sur le trottoir sa production de meuble et le droit pour l'ouvrier ébéniste de travailler sur une production personnelle dans l'atelier de son employeur, à l'heure de la pause, après le travail ou même dans sa chambre. Il écoulait sa production le plus souvent à la Trôle.
Il faut rappeler que l’embauche était à la journée et la crise sociale rude, notamment due à l'essor industriel pendant le 19e siècle.
Mais la Trôle était aussi un espace de liberté où on pouvait produire et vendre en dehors de toutes réglementations et sans patente.
Elle était centrée principalement au carrefour Ledru-Rollin / Faubourg St-Antoine, place très importante entre la rue moyenâgeuse et la nouvelle avenue haussmannienne. On trouve encore aujourd'hui au 55 rue Traversière, l'entrée de l'ancien passage de la Trôle, relique de cette ancienne pratique.
Sorte de "marché aux puces" avant l’heure, la Trôle avait lieu régulièrement le samedi. Les meubles réalisés pour elle, dans un coin d’atelier, en dehors des heures et avec la tolérance du patron, étaient donc plutôt petits, souvent par paire ou par six, surtout des guéridons, des commodes, des bonheur-du-jour selon la mode du moment.
Après la guerre de 14, le marché est surtout professionnel et se passe au café.
L’artisan "libre" y rencontre le marchand sans boutique, et après visite des meubles sur la charrette
et d'âpres négociations, la livraison est effectuée en étages. Quand on connaît les escaliers tortueux du quartier, ce n’était pas une partie de plaisir et l’artisan était heureux s'il pouvait en retirer les trois quarts du prix, mais il faut bien avouer que le bois n’était pas toujours de la meilleure qualité.
La Trôle va perdurer à peu près jusqu’au Front Populaire, mais petit à petit la concurrence provinciale ou étrangère va jouer et les marchands se désintéressèrent des meubles produits en fond de cours.
Aujourd’hui, on retrouve un peu de cette tradition dans certains marchés aux puces, véritable héritage de la Trôle.